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Album "les héros du konpa"

Ils sont légendes à reconnaître Antoine Rossini Jean-Baptiste (Ti Manno) comme étant l'artiste porte-étendard de tous les exclus mis à l'amende par notre société. Il a pu créer un langage qui lui a valu sa renommée de génie, à chaque fois qu'il évoquait le malaise social utilisant son micro et sa voix comme baïonnette ; avec un message parfois austère, souvent d'une vérité poignante, ses brillantes satires, ses abbatages qui dévoilent et mettent à nu le quotidien Haïtien. A cet égard Clifford Sylvain vient de dépasser grandement le seuil du quintal en produisant cet album "les héros du konpa" pour rendre hommage à cette figure culte de la musique dansante Haïtienne. A sa façon, Clifford vient réparer une injustice artistique faite par ceux qui, trop souvent, ont tendance à oublier Ti Manno. Avec des musiciens célèbres et respectés, "les héros du konpa" est un album à avoir par amour ou par pure obligation. Vous allez apprécier la manière dont une cohorte d'artistes reprennent les plus beaux morceaux du défunt dans des interprétations de premier ordre. Ils imposent une fois de plus leurs talents pour faire perdurer l'âme de Antoine Rossini Jean-Baptiste. Aussi, un buste de l'artiste sera érigé au musée des Artistes au Champ-de-Mars

 

(Ralph Delly, juin 1997, album Les Héros du Konpa)

 

 

 

 

« Partout où nous allons, nous sommes en danger »  

Ti Manno et l'apparition d'une identité transnationale haïtienne est un article écrit par Nina Glick-Schiller et Georges Fouron, Ethnologue américain (mai 1990)

 

RESUME : Les paroles des chansons de Ti Manno, chanteur haïtien populaire, et le mouvement de courte durée généré par Ti Manno sont étudiés afin d'élucider les facteurs qui amènent à la formation d'identités multiples et se chevauchant, des immigrés haïtiens. Il y est argumenté qu'en tant qu'immigrés noirs, les haïtiens tendent à être des « transnationals » qui  se façonnent des identités leur permettant de s'adapter et de résister aux réalités des problèmes de race et de classe présentes en Haïti et aux Etats-Unis.

EXTRAIT :

Au cours de la deuxième semaine de mai 1985, la nouvelle s'était répandue rapidement parmi les Haïtiens de New York, que Ti Manno, un chanteur haïtien populaire, serait décédé.

Les rumeurs ont été mises de côté, lorsque Ti Manno téléphona à une station de radio pour dire qu'il était vivant mais malade ; il demanda que des prières soient dites à son intention. Un certain nombre de personnalités haïtiennes du devant de la scène ont répondu en créant un mouvement de soutien appelé « Opérasyon men kontré », qui a eu pour but immédiat de récolter de l'argent pour payer les factures d'hôpital de Ti Manno. Ti Manno n'a pas demandé cet argent et n'en avait pas besoin. Les urnes de collecte placés dans des commerces haïtiens et dans des magasins de la banlieue new yorkaise, les dons de personnes vivant en Haïti rapportèrent 10 000 dollars en un mois. Et dans le but d'obtenir plus d'argent, un concert, regroupant les musiciens haïtiens les plus connus, eut lieu à New York.

Mais le jour suivant le concert, le mot circulait que Ti Manno était mort. Cette fois, la rumeur était vraie. L'histoire a fait la une des journaux haïtiens de New York, qui présentaient également les modalités de mise en bière (pour voir le corps) et celles ayant trait aux funérailles et à l'enterrement. La rumeur disait aussi que Ti Manno avait souhaité sur son lit de mort, que son corps ne tombe pas entre les mains du gouvernement Duvalier. Afin de respecter son vœu, son corps devra être enterré à New york ce, jusqu'au renversement du régime de Duvalier. Les restes de Ti Manno devronts ensuite retourner en Haïti pour une inhumation permanente.

Lors de la présentation du corps de Ti Manno, des barrières avaient été posées afin de contenir la foule, car plus de 5000 personnes en file indienne défilèrent près de son cercueil, beaucoup pleurant ouvertement. Le jour de l'enterrement, des personnes endeuillées remplirent l'église bien des heures avant le début du service funèbre. Plus de 1000 personnes assistaient à la cérémonie, tandis que des centaines d'autres attendaient au dehors.

La semaine suivante, la mort de Ti Manno fut le sujet de toutes les conversations des haïtiens de New York. Des journaux haïtiens publièrent la vie de Ti Manno ainsi que l'éloge faite par son frère, un prêtre catholique qui avait fait le déplacement d'Haïti pour officier à ses funérailles. Les journaux imprimèrent les messages de condoléances envoyés par un grand nombre d'haïtiens des Etats-Unis (d'hommes d'affaires proéminents ou de simples citoyens).

La grande couverture médiatique, les semaines qui suivirent la mort de Ti Manno, ne firent pas état de la nouvelle rumeur qui commençait à circuler : des voix murmuraient que Ti Manno serait mort du Sida... (à suivre)

Title: 'Everywhere we go, we are in danger': Ti manno and the emergence of a Haitian transnational identity

Published By: American ethnologist -- Vol. 17, no. 2 [Washington]: American Ethnological Society. 1990. 329-347 p.

By line:Nina Glick-Schiller ; Georges Fouron

Lire l'article en anglais : https://www.jstor.org/stable/645083?origin=JSTOR-pdf&seq=1

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Traduction Marie-F. juillet 2007                  

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