Interview de Dieudonné Larose

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Qu'est-ce qui a motivé ton intérêt pour les grandes causes ?

Ce n'est pas le privilège de tout le monde, il faut être appelé ; c'est un engagement. Dès mon  plus jeune âge (déjà avec Shoogar Combo) cela me tenait à cœur. Sous le régime de Duvallier, j'étais obligé d'utiliser des paraboles pour exprimer ce que je pensais ; par la suite (après le départ du Président), j'ai pu le faire plus librement.

Je dis simplement des choses que je pense, qui sortent de mes entrailles. Je tiens à délivrer un message d'amour ; je n'envoie personne à l'abattoir, je ne cherche qu'à faire prendre conscience que nous sommes tous frères, qu'il n'existe pas un peuple supérieur à un autre, car à l'origine nous sommes tous originaires d'Afrique.

Dénonces-tu ce que tu as vécu personnellement ?

Oui ce que j'ai vécu personnellement mais aussi ce que je vois. Ma mission exige des sacrifices, tout comme le médecin qui a fait serment de soigner, de guérir.

La charge est-elle si lourde que tu as déjà été tenté de la poser ?

Cela arrive, mais la musique est une drogue (surtout la musique noir ) c'est une responsabilité.

Pourquoi une chanson sur l'île de Marie-Galante ?

J'ai aussi chanté la Guadeloupe, mais cette chanson n'a pas eu autant d'impact que celle sur Marie-Galante. A M-Galante, j'ai été touché, ébloui. Le public m'a dit : « nous t'aimons trop ici, fais-nous une chanson ! ». Ils l'ont mérité.

Quel est le plus grand cadeau qu'un fan t'est fait ?

On m'a beaucoup donné, mais un présent qui m'a fait énormément plaisir est une guitare que m'avait offert une française, à Paris, pour mon 17ème ou 18ème anniversaire. Cette guitare j'ai du la laissée en Haïti.

A propos d'Haïti

On n'honore pas, on ne donne pas leur valeur aux hommes, en Haïti. C'est la raison pour laquelle les jeunes sont perdus ; ils n'ont pas de bons exemples à suivre.

Je ne peux vivre dans mon pays, car personne n'est responsable de ma sécurité ; et je souffre de cela. La situation ne me permet pas de vivre comme un être humain. Pour disposer des services modernes fondamentaux (nourriture, électricité…) 24h/24h, il faudrait être millionnaire.

La première nation noire indépendante ne mérite pas cela !

Comment ne pas avoir mal en regardant ses frères souffrir !

Sur la vie

Il faut s'aimer soi-même et il faut aimer ce que l'on fait.

On n'a pas d'avenir sans connaître son passé, sans être conscient de la valeur des hommes d'autrefois.

Les hommes qui ont marqué l'Humanité sont à compter sur les doigts d'une main.

Pour lui il est important d'écouter l'autre, de l'entendre ; tout comme il est fondamental de parler, de se vider, de communier. Une de ses maximes favorites est : « Je ne suis pas d'accord avec ce que vous dîtes mais je me battrai pour que vous le dîtes » de Victor Shoelcher.

La politique dans les pays sous-développés c'est l'augmentation de la misère : c'est une mère que l'on rencontre avec deux enfants, à qui l'on propose monts et merveilles et qu'on abandonne avec cinq enfants peu de temps après.

La race noire est égoïste.

Les hommes noirs n'ont pas d'ambition, ils sont condamnés à être des assistés.

A propos de lui-même

Je suis un grand timide.

Je n'assiste pas à des concerts d'artistes, de groupes haïtiens, car je ne me sens pas en sécurité dans le public.

Je n'ai jamais touché aux drogues ou à l'alcool (exception faite d'une lampée de « Ti Punch » en Guadeloupe en juillet 2006 !). Quand on a la crainte de Dieu, comme moi, on évite de prendre ces chemins.

Il déteste la méchanceté gratuite.

Je suis déjà prêt à mourir, puisque je sais que ce que je révèle ne plaît pas à tout le monde. Mais cette mort sera avant tout une délivrance (un soulagement de quitter cette terre où règne tant d'inégalités).

Je peux dire que ma carrière est assurée, car j'ai mon propre studio d'enregistrement, je suis ingénieur du son, je chante ; donc, je ne dépends pas du bon vouloir des autres (à la différence de Ti Manno, par exemple).

Je veux que l'on m'aime pour moi et non pour l'artiste. Or, les gens aiment surtout ce qui brille.

Je sépare ma vie privée de ma vie d'artiste : Larose est l'ami de tout le monde, mais Dieudonné est resté dans son coin. J'ai peu d'amis, quelques contacts sur internet.

Je suis styliste, je cuisine bien (le blaff entre autres).

A propos de Freddy (Top Vice) : c'est un combattant

Antilles Compas, le 24 Juillet 2006